Le 14 décembre 2000, au grand plaisir de Jean Charest, l’Assemblée nationale du Québec votait une motion de blâmant Yves Michaud pour des propos supposément antisémites. Ce vote a été pris sans que M. Michaud puisse être entendu et sans que les députés aient pris connaissance de ses propos. Certes, certains propos de M. Michaud, comme ceux relatifs au fait que les Juifs n’étaient pas le seul peuple ayant souffert [1], étaient inhabiles. Mais cela ne justifiait aucunement une accusation d’antisémitisme et encore moins un blâme de l’Assemblée nationale. D’ailleurs, ces propos n’ont pas été rapportés comme un incident antisémite par les organismes de défense des Juifs dans leurs bilans suivants l’affaire Michaud.
Cette affaire n’avait donc rien à voir avec l’antisémitisme… et tout à voir avec l’anti-nationalisme québécois. En effet, il faut se rappeler que la fin des années 1990 et le début des années 2000 sont marqués par un « délire » collectif au sujet du nationalisme. Car suite aux déclarations de Jacques Parizeau au sujet du vote ethnique, les souverainistes veulent à tout prix être blanchis de tout soupçon de nationalisme ethnique. Pour ce faire, ils abandonnent le combat de la langue (c’est l’épisode du discours du Centaur et celui de la Commission Larose), la thèse des deux peuples fondateurs (c’est l’épisode de la conversion du Bloc au trudeauisme), etc. Mais ce n’est pas suffisant. Il faut un coup théâtre, si possible un sacrifice humain. Yves Michaud qui souhaite briguer l’investiture du Parti Québécois dans Mercier pour ramener la question linguistique sera l’agneau sacrificiel parfait.
Cependant, alors qu’on s’attendait à ce que le sacrifié disparaisse seul dans la honte, il est appuyé par une vaste coalition citoyenne. Des artistes, des intellectuels et des militants du Parti Québécois forment Solidarité Yves Michaud pour défendre l’homme et son honneur. Ils multiplient les lettres ouvertes et les événements publics pour dénoncer haut et fort le vote de blâme de l’Assemblée nationale. Les députés du Parti Québécois qui ont participé à ce vote finiront pratiquement tous par s’excuser…
Plus important encore, à partir de cet événement, plus jamais les nationalistes québécois ne se laisseront traiter de tous les noms. Désormais, ils allaient répliquer à chaque attaque, répondre à chaque insulte et repasser à l’offensive.
Si aujourd’hui le Québec est dirigé par un gouvernement véritablement nationaliste, c’est entre autres grâce au courage des membres de Solidarité Yves Michaud.
Me Guillaume Rousseau
Professeur de droit à l’Université de Sherbrooke
[1] Ndlr : Il faut noter que cette comparaison émanait d’une conversation privée et amicale –racontée à la radio de façon anecdotique- entre Yves Michaud avec le Sénateur Leo Kolber. Ce dernier, visiblement peu offusqué, ne se rappelle tout simplement pas de cette partie de l’échange.